mardi 11 août 2009, par
Sacha Guitry, de son nom complet Alexandre Georges-Pierre Guitry est un comédien, dramaturge, metteur en scène de théâtre, réalisateur et scénariste de cinéma, né le 21 février 1885 à Saint-Pétersbourg (Russie), mort le 24 juillet 1957 à Paris (72 ans). Auteur dramatique très prolifique, il a écrit plus d’une centaine de pièces de théâtre et en a adapté lui-même un grand nombre au cinéma. Interprète de la quasi-totalité de ses films, il est l’auteur d’une œuvre, riche de trente-trois films, qui comprend notamment Le Roman d’un tricheur, Désiré, Mon père avait raison, Quadrille, Ils étaient neuf célibataires, La Poison, Si Versailles m’était conté, Assassins et voleurs.
Sacha Guitry est le fils de Lucien Guitry (1860 - 1925), grand comédien de théâtre, très célèbre à son époque, et de Renée Delmas dite de Pont-Jest[1], fille du journaliste René de Pont-Jest. Élève médiocre, Guitry se révèle très tôt brillant comédien et bien vite excellent auteur et metteur en scène. Il écrit lui-même ses propres pièces, parfois en moins de trois jours, et en assure la mise en scène et l’interprétation. Nono (1905) remporte un vif succès.
L’échec de La Clef, en 1907, décourage un temps Sacha Guitry et c’est le soutien indéfectible de son grand aîné Octave Mirbeau qui lui donne le courage de continuer ; admiratif et reconnaissant, Sacha Guitry sollicite de lui une préface pour sa Petite Hollande en 1908 et, plus tard, lui consacre une pièce, Un sujet de roman, créée le 4 janvier 1924 par son père Lucien Guitry dans le rôle du grand écrivain. Sarah Bernhardt doit être aussi de la création, dans le rôle d’Alice Regnault, mais la Divine meurt avant la première. Il écrit sur mesure pour sa deuxième épouse Yvonne Printemps plusieurs comédies musicales à très grand succès (Mozart, L’amour masqué...) et sept revues avec son ami Albert Willemetz.
Homme d’esprit à l’humour caustique, c’est Sacha Guitry qui découvre et lance Raimu dans Faisons un rêve. Il fait les délices du public mais s’attire également la jalousie des critiques. Il est un peu l’opposé du théâtre du Cartel des quatre créé notamment par Louis Jouvet et Charles Dullin. Sacha Guitry utilise déjà au théâtre les techniques qu’il utilisera plus tard au cinéma : s’approprier les règles, les codes d’un genre, les détourner et les plier à son propre style.
Avec le cinéma, les rapports sont d’abord très tendus. Il fait une première tentative en 1915, en réalisant Ceux de chez nous, en réaction à un manifeste allemand exaltant la culture germanique. Il filme certains amis de son père, Rodin, Claude Monet, Anatole France, Auguste Renoir, entre autres. Il note leurs paroles et les répète durant les diffusions publiques, inventant en quelque sorte, et avant l’heure, la voix off.
Portrait de Sacha Guitry dans son bureau de l’avenue Elisée-Reclus en 1942, par Léon Gard (coll. André Bernard)
Comme Jouvet, il reproche au cinéma de ne pas avoir la même puissance que le théâtre et ne s’y met qu’en 1935, sous l’influence de sa jeune épouse Jacqueline Delubac. Comprenant que le cinéma permet une survie, en fixant les images sur la pellicule, il décide de mettre en boîte certaines de ses pièces de théâtre. D’abord Pasteur, écrite par Sacha pour son père Lucien Guitry et interprétée par ce dernier, pièce qui donne libre cours à sa passion pour l’histoire et les personnages historiques. Œuvre prophétique car, dans une scène, Louis Pasteur, joué par Sacha Guitry, déclare à ses confrères : « Messieurs, je sais que je n’utilise pas le style conventionnel auquel vous êtes habitués. » Phrase lourde de sens qui semble destinée aux critiques qui le dénigrent depuis qu’il fait du théâtre. La même année, il réalise Bonne chance ! et donne le premier rôle féminin à Jacqueline Delubac. Le style de Guitry s’y affirme un peu plus.
En 1936, il tourne à partir de la pièce qu’il a écrite Le nouveau testament. Puis, toujours en 1936, il réalise Le roman d’un tricheur, pour beaucoup son chef-d’œuvre. Dans ce film, presque sans dialogue, à l’exception de quelques scènes, Guitry met en scène l’unique roman qu’il a écrit, Mémoires d’un tricheur. Il est le narrateur du film, et déjà son goût pour les histoires contées apparaît. Si l’histoire peut sembler banale, elle est en fait un éloge du cinéma, art de l’illusion. Tout Guitry est contenu dans ses quatre premiers films : jeu avec les procédés filmiques, reconstitution d’évènements ou biographie de personnages historiques, adaptations théâtrales. De 1935 à 1937, en trois ans, Guitry réalise dix films, dont au moins trois chefs-d’œuvre[2].
À la fin des années 1930, tout va pour le mieux dans la vie de Guitry. Le seul point noir est son divorce d’avec Jacqueline Delubac, mais il se console rapidement et épouse Geneviève de Séréville qui est la seule de ses cinq épouses à porter le nom de Guitry. À propos des femmes, Guitry a déclaré : « Les femmes, je suis contre... tout contre. » Son nom est proposé pour l’Académie française mais Guitry refuse la condition qu’on lui impose : abandonner son activité de comédien. En 1939, il est élu à l’Académie Goncourt et réalise Ils étaient neuf célibataires, avec de nombreuses vedettes dont Elvire Popesco. Guitry y traite du mariage blanc, thème éternel.
Mais le film est en prise presque directe avec l’actualité car l’histoire part d’un décret qui oblige les étrangers à quitter la France. Le lendemain de la première de son film, la guerre éclate.
La situation se complique pour le Parisien Guitry qui ne veut pas quitter la capitale alors sous l’Occupation allemande. Pendant quatre ans, à l’écart de toute pensée politique, il continue sa vie d’homme de théâtre et de cinéma, pensant ainsi assurer la présence de l’esprit français face à l’occupant allemand[3]. Il joue de son influence pour obtenir la libération de personnalités, notamment de l’écrivain Tristan Bernard et de son épouse, et parvient à mettre en scène Le Destin fabuleux de Désirée Clary, autour de la célèbre fiancée de Napoléon, film qui oppose la figure de l’Empereur aux visées de l’impérialisme allemand, et Donne-moi tes yeux, « réflexion originale sur le regard masculin ». Son album 1429-1942 - De Jeanne d’Arc à Philippe Pétain, catalogue des gloires françaises, politiques et artistiques, témoigne, toutefois, d’un aveuglement politique assez permanent, au point de faire l’objet d’un film de présentation, projeté en mai 1944.
Le 23 août 1944, lors de la Libération de Paris, quelques heures après avoir parlé au téléphone avec son amie Arletty, il est arrêté par un groupe de résistants, agissant de leur propre initiative, qui lui reprochent son attitude à l’égard de l’occupant allemand. Il est incarcéré 60 jours sans inculpation. Il est alors dénoncé dans la presse - sur des rumeurs infondées - par des écrivains comme Pierre Descaves ou certains journalistes du Figaro (dirigé alors par Pierre Brisson, dont il s’était fait un ennemi). Le juge d’instruction, ne sachant que lui reprocher, fait paraître dans les journaux, à deux reprises, des annonces demandant qu’on lui communique les accusations contre Guitry. Il n’obtient aucune réponse probante et classe le dossier[5]. Guitry obtient, en 1947, un non-lieu tardif (il dira plus tard qu’il aurait préféré un procès).
Ses détracteurs oublient qu’il s’est toujours opposé à ce que ses pièces soient jouées en Allemagne. Il s’en souviendra et lorsqu’il déclare à Pauline Carton, dans le générique de La Poison, que le décor de la cellule a été réalisé à partir de ses souvenirs, on sent poindre l’amertume dans sa voix. Tentant de prendre la chose avec humour, il déclare : « La Libération ? Je peux dire que j’en ai été le premier prévenu. » Il publiera ses souvenirs sous forme de deux récits : Quatre ans d’occupations (un pluriel significatif) pour la période de 1940 à août 1944 et 60 jours de prison pour les deux mois pénibles et humiliants qui suivirent. Il commente, en filigrane, son comportement dans Le Diable boiteux, biographie de Talleyrand qui soutint plusieurs régimes avec toujours comme seul but de servir la grandeur de la France.
Les années 1930 ont été des années de rêves et les années 1940 des années noires ; les années 1950 vont être une synthèse des deux décennies écoulées. Il rédige le scénario d’Adhémar ou le jouet de la fatalité mais, malade, il en confie la réalisation à Fernandel, qui a déjà réalisé un film. Devant le résultat, Guitry s’estime trahi et intente un procès à Fernandel. Procès qu’il perd. Ce film annonce la suite de l’œuvre du cinéaste. Le ton est plus mélancolique (Le comédien, Deburau, Le Trésor de Cantenac), parfois caustique (Je l’ai été trois fois, La Poison, La Vie d’un honnête homme), mais toujours comique (Toâ, Aux deux colombes, Tu m’as sauvé la vie).
Ses amis le soutiennent et la reconnaissance vient avec la commande de grosses productions historiques : Si Versailles m’était conté, Napoléon, Si Paris nous était conté. Mots d’esprits et distribution prestigieuse font le charme de ces fresques. Il n’oublie pas son arrestation et réalise le très caustique Assassins et voleurs emmené par le duo Jean Poiret-Michel Serrault et dans lequel Darry Cowl fait ses débuts avec une scène pratiquement improvisée mais hilarante. Les trois font la paire est le dernier film qu’il réalise avec l’aide de l’acteur-producteur-réalisateur Clément Duhour, car la maladie l’a beaucoup affaibli. Film-somme sur le cinéma de Guitry où l’on retrouve tout ce qui fait le sel de son œuvre : jeu avec les procédés filmiques, fidélité avec certains acteurs, humour caustique. Son testament artistique est le scénario de La Vie à deux qu’il rédige et où il refond plusieurs de ses pièces ; c’est Clément Duhour qui le réalisera après la mort du cinéaste, avec une pléiade de vedettes venues rendre hommage au maître.
Sacha Guitry repose au cimetière de Montmartre, à Paris, avec son père Lucien Guitry, son frère Jean, mort en 1920, et sa dernière épouse Lana Marconi, décédée en 1990.
Sacha Guitry incarné par Denis Podalydès à la Cinémathèque française le 15 décembre 2007
Sacha Guitry tient le rôle principal de presque tous ses films. Mais il sait parfois s’effacer lorsque cela est nécessaire, comme dans le film à sketch Ils étaient neuf célibataires, avec de grands noms au générique : Saturnin Fabre, Elvire Popesco, Gaston Dubosc. L’homme est un ami fidèle et Pauline Carton est de pratiquement tous ses films, Guitry lui inventant parfois des rôles. Il confie le rôle principal de La Poison et de La Vie d’un honnête homme à Michel Simon, ainsi que celui de son dernier film Les trois font la paire que Simon n’aime pas mais qu’il accepte de jouer par amitié pour Guitry alors mourant. Acteur mais également metteur en scène, il sait détecter les nouveaux talents : Louis de Funès, Darry Cowl, Michel Serrault, Jacqueline Delubac pour ne citer que ceux-là, sont lancés par Guitry. Raimu, reconnaissant envers celui qui l’a lancé, accepte de jouer gratuitement dans Les Perles de la couronne, et Guitry écrit sur mesure, pour Fernandel, le scénario d’Adhémar. Il sollicite souvent Gaby Morlay pour jouer des pièces de théâtre, et deux de ses films.
Parmi les grands noms déjà cités, signalons également Erich Von Stroheim, Orson Welles, Jean Cocteau, Jean Gabin, Gérard Philipe, Jean Marais, Danielle Darrieux, Michèle Morgan, Pierre Larquey, Jean-Louis Barrault, Arletty, Édith Piaf, Robert Lamoureux, Yves Montand, Jean-Pierre Aumont, Luis Mariano, Jacques Varennes, Suzanne Dantès, Saturnin Fabre, Brigitte Bardot... Tout au long de son œuvre, Guitry se fait le chantre du comédien, de son père en particulier. Il réalise une biographie, Le comédien, et une adaptation théâtrale, Mon père avait raison. Pour lui, Lucien Guitry et Sarah Bernhardt sont les deux plus grands acteurs du monde et il ne manque pas de le rappeler dans les nombreux articles qu’il signe. Du reste, certains de ses films semblent être conçus pour les acteurs : Les Perles de la couronne, Ils étaient neuf célibataires, Le Trésor de Cantenac, ou encore sa trilogie historique.
Avec la critique, Sacha Guitry a toujours entretenu des relations conflictuelles, et ce dès son travail au théâtre. Guitry invente un style qui lui est propre, basé sur des dialogues incisifs et percutants, souvent déclamés par lui. C’est son statut de comédien et d’auteur complet, son apparente facilité et le succès constant qu’il obtient pendant plus de vingt ans, qui le rendent insupportable aux yeux des critiques. Du reste, Guitry se venge tout au long de son œuvre et ne cesse de railler cette profession qui n’a jamais voulu faire l’effort de le comprendre. On reproche à ses films de n’être que du « théâtre filmé ». Mais Guitry, comme Marcel Pagnol, autre auteur dramatique de théâtre et de cinéma, impose son style, se construit un univers à part entière. Souvent, les critiques reprochent à Guitry de dévoiler les artefacts du tournage. Le cinéaste, en montrant son style, appose sa griffe et empêche quiconque de le copier. Le summum est atteint avec Ils étaient neuf célibataires : à la fin du film, Guitry mélange réalité et fiction en faisant croire à « l’amant sérieux » d’Elvire Popesco que tous deux sont en train de tourner un film. La réalité va plus vite que la fiction. Et le film se fait descendre par la critique, malgré des réactions positives.
Parmi les critiques les plus virulentes, on retrouve régulièrement l’accusation de mégalomanie, de prétention. Lorsque Guitry met en scène Si Versailles m’était conté, film montrant le château de Versailles de sa naissance à nos jours, on lui reproche d’être passé à côté de son sujet et d’avoir réalisé une visite au musée Grévin. La critique démolit le film et oublie que Guitry est réalisateur avec toutes les responsabilités que cela implique, mais également scénariste, dialoguiste et acteur. Peu de cinéastes assument autant de charges. Précisons qu’Orson Welles, qui a joué dans Si Versailles m’était conté et Napoléon, considérait Guitry comme son maître. Du reste, il existe plusieurs points communs entre les deux artistes : tous deux hommes de théâtre, de radio, férus de littérature, ayant le même sens de l’humour.
Une autre hypothèse peut être envisagée pour expliquer ses rapports tendus avec la critique : la virtuosité et l’évidente facilité avec laquelle le Maître se meut dans l’univers filmique. Lorsqu’il réalise Le Destin fabuleux de Désirée Clary, il place le générique en plein milieu du film et s’offre le luxe de changer plusieurs interprètes avec une finesse rare. Du cinéma, Guitry a déclaré : « C’est une lanterne magique. L’ironie et la grâce ne devraient pas en être exclues. » Une autre anecdote résume le personnage : lors du tournage de Napoléon (film, 1955), un technicien, en visionnant les rushes, fait remarquer à Guitry que l’on voit une caméra dans le champ. Le cinéaste lui répond : « Mon ami, le public se doute bien que nous avons utilisé des caméras pour réaliser ce film. »[6] Désinvolture, élégance, finesse et humour alliés à une solide maîtrise technique. Cela a de quoi attirer les médisances et les jalousies. Il est réhabilité par la Nouvelle Vague[7] et François Truffaut[8] en particulier, qui voit en lui l’auteur complet, comme Charlie Chaplin.
Malgré sa posture de misogyne, Sacha Guitry a été marié cinq fois, et uniquement avec des actrices (encore que les deux dernières ne le soient devenues qu’à son contact). On lui connaît en outre de nombreuses liaisons avec des comédiennes et artistes, parmi lesquelles la danseuse « Belle Époque » Jane Avril, la comédienne Arletty, qui a refusé de l’épouser (« J’allais pas épouser Sacha Guitry, il s’était épousé lui-même ! », cité par Francis Huster), les actrices Simone Paris (qui consacre un chapitre de ses mémoires, Paris sur l’oreiller, au récit détaillé de leur romance), Mona Goya et Yvette Lebon, etc.
Cinq épouses donc :
1. Charlotte Lysès (1877 - 1956), qu’il épouse le 14 août 1907 à Honfleur, au grand dam de Lucien Guitry, ex-amant de Charlotte... Elle crée 19 pièces de son mari et reprend Nono en 1910. Séparé depuis avril 1917, le couple divorce le 17 juillet 1918.
2. Il épouse Yvonne Printemps (1894-1977) à Paris le 10 avril 1919, avec comme témoins Sarah Bernhardt, Georges Feydeau, Lucien Guitry (avec qui il vient juste de se réconcilier) et Tristan Bernard. Yvonne Printemps crée 34 pièces de Sacha Guitry, en reprend 6 autres et interprète un de ses films, Un roman d’amour et d’aventures (1918). Yvonne Printemps ne sait pas être fidèle : elle a des aventures avec Jacques-Henri Lartigue, Maurice Escande, Pierre Fresnay, d’autres... Le 15 juillet 1932, Yvonne Printemps quitte Sacha Guitry pour Pierre Fresnay (lequel de son côté quitte pour elle la comédienne Berthe Bovy), mais ne l’épouse jamais. Le divorce entre Sacha et Yvonne est prononcé le 7 novembre 1934.
3. Il se marie avec la jeune Jacqueline Delubac (1907-1997), de 22 ans sa cadette, le 21 février 1935 à Paris. Comme il a 50 ans, il annonce leur mariage en déclarant : « J’ai le double de son âge, il est donc juste qu’elle soit ma moitié », rajeunissant légèrement et galamment la mariée (et dès lors, pour la beauté du mot et l’exactitude des comptes, Jacqueline prétendra être née en 1910 et non en 1907). Elle joue 23 pièces de son mari, dont 10 créations et 13 reprises à Paris et en tournée, et interprète 11 de ses films. Séparés depuis le 15 décembre 1938, les deux époux divorcent le 5 avril 1939.
4. Son mariage avec Geneviève de Séréville (1914-1963) est célébré les 4 et 5 juillet 1939 à Fontenay-le-Fleury. Geneviève crée 5 pièces de son mari à Paris, en reprend 4 autres à Paris ou en tournée et interprète 5 de ses films. Le couple se sépare en avril 1944 et leur divorce est prononcé le 25 juillet 1949.
5. Il épouse enfin Lana Marconi (1917-1990) le 25 novembre 1949 à Paris. Elle crée 7 pièces de son mari, en reprend 2 autres et interprète 13 de ses films.
Guitry a souvent évoqué sa prédilection pour les femmes : « La vie sans femme me paraît impossible ; je n’ai jamais été seul, la solitude c’est être loin des femmes », mais il s’est acquis une réputation de misogyne que bien des répliques de ses pièces semblent confirmer. Ses épouses, cependant, qui lui ont reproché bien des choses, ne lui ont jamais fait le reproche d’être misogyne mais évoquent au contraire son amour pour les femmes, sa séduction et sa finesse. Dans Faut-il épouser Sacha Guitry ?, Jacqueline Delubac écrit : « À la femme il refuse la logique de l’esprit, pas celle du sexe ! Traduction : il ne suffit pas que la femme dispose, il faut qu’elle propose. C’est le caprice de Sacha de tout attendre du caprice des femmes » ; et plus loin : « Sacha, tu es un diable électrique ! Tu connais les escaliers cachotiers du cœur ! Les drôles de coin ! ». Geneviève de Séréville, dans Sacha Guitry mon mari, évoque les causeries de Sacha sur l’amour et les femmes et avance une hypothèse : « Parler des femmes et de l’amour n’est-il pas devenu, pour lui, une sorte de jonglerie dans laquelle son cœur ne joue aucun rôle, mais seulement son aisance dans l’ironie, son goût excessif du paradoxe ».
Avec les salves de misogynie de quelques-unes de ses pièces, Guitry se venge sans doute, avec des mots, des infidélités, des maux, que certaines de ses compagnes ont pu lui faire subir, Yvonne Printemps notamment. Mais Dominique Desanti, dans la biographie qu’elle lui a consacrée, remarque aussi, à propos de N’écoutez pas Mesdames, pièce tissée de railleries contre les femmes : « Sous les répliques spirituelles court l’angoisse de l’homme vieillissant face à une femme trop jeune qui lui échappe... ce qu’il trouve à la fois insupportable et naturel ».
Guitry lui se justifie en disant : « Tout ce mal que je pense et que je dis des femmes, je le pense et je le dis, je ne le pense et je ne le dis que des personnes qui me plaisent ou qui m’ont plu ». Ce n’est d’ailleurs pas tant avec les femmes qu’il a un problème, qu’avec le mariage : « Le mariage, c’est résoudre à deux les problèmes que l’on n’aurait pas eu tout seul ». La séduction a certainement pour lui plus de charme que le quotidien à deux. Il écrit cependant : « Il faut courtiser sa femme comme si jamais on ne l’avait eue... il faut se la prendre à soi-même ».
Si l’on peut citer bien des répliques et des "bons (?) mots" misogynes dans ses pièces et dans ses causeries, aucun témoignage ne donne d’exemple de propos semblables dans l’intimité et encore moins de gestes ou d’attitudes qui pourrait laisser penser que l’homme Sacha Guitry ait été un misogyne. Selon Francis Huster, fin connaisseur de Sacha : « On dit souvent que Guitry est misogyne ; c’est n’importe quoi. Dans ses pièces, c’est l’homme qui trompe, pas la femme. Il était fou des femmes. Elles n’ont malheureusement jamais été folles de lui. Peut-être parce qu’il n’a jamais su les entendre, même s’il savait leur parler[9] ».
* Sacha est le diminutif russe d’Alexandre. Le tsar Alexandre III était en effet son parrain.
* Comme il l’explique dans son discours de cent lignes, prononcé lors du banquet du centenaire de Janson-de-Sailly, il fut expulsé de 11 lycées différents. Il explique dans un de ses ouvrages que c’était en raison des déplacements de son père qu’il redoubla sa sixième 10 fois. En effet, à l’époque, on recommençait l’année si l’on changeait d’établissement, ce qui était périodiquement son cas. Il fêta ses 18 ans en sixième et arrêta là ses brillantes études.
* Durant l’hiver 1889, alors que Sacha a 4 ans, son père, Lucien Guitry, qui est en train de se séparer de son épouse, sort un moment avec Sacha pour chercher des gâteaux au coin de la rue, et de coin de rue en coin de rue (car la pâtisserie la meilleure est plus loin), il l’entraîne en fait jusqu’en Russie, lieu de ses futures représentations. En Russie, Sacha joue enfant devant le Tsar et la famille impériale. C’est là-bas qu’il entend que son père « va jouer tous les soirs pour travailler ».
* Malgré le vif soutien de Tristan Bernard et de nombreuses personnalités de la Résistance, Sacha Guitry est injustement soupçonné de collaboration à la Libération, et incarcéré pendant 60 jours (d’où son livre 60 jours de prison). Un non-lieu complet est prononcé. « Il n’y avait donc pas lieu ! », commenta ironiquement Sacha Guitry, qui déclara par ailleurs : « La Libération ? Je peux dire que j’en ai été le premier prévenu. » Pour la petite histoire, c’est Alain Decaux qui évite le pillage de sa maison car il est à l’époque mobilisé et, connaissant Guitry, il demande à surveiller sa maison. En souvenir de ce beau geste, Lana Guitry lui offre l’émeraude que Sacha portait et qui trône désormais sur la poignée de son épée d’académicien. De son arrestation, il dit : « Ils m’emmenèrent menotté à la mairie. J’ai cru qu’on allait me marier de force ! »
* Le divorce par consentement mutuel n’étant pas reconnu à une époque, des lettres d’injures mutuelles étaient exigées de la part des deux parties pour en obtenir le prononcé. Dans les divorces concernant Sacha Guitry, notamment celui soldant son mariage avec Yvonne Printemps, on reconnaît nettement sa patte d’humoriste dans les lettres fournies par les « deux » parties.
* Collectionneur avisé, il possédait dans son hôtel particulier du Champ de Mars, 18 avenue Élisée-Reclus une splendide collection d’œuvres d’art (peintures, sculptures, lettres autographes...) dont il souhaitait faire, à sa mort, un musée. Malheureusement, les œuvres furent peu à peu dispersées à sa mort et son projet ne vit jamais le jour. Malgré les protestations de ses nombreux amis l’hôtel fut démoli en 1963.
* À l’occasion de son jubilé (sa première pièce ayant été jouée le 16 avril 1902 au Théâtre des Mathurins) l’éditeur Raoul Solar réalisa gracieusement en 1952 un ouvrage intitulé simplement 18 avenue Elisée Reclus, commenté par Sacha lui-même. Il peut être considéré comme le catalogue de l’exposition de ses collections, exposition faite au bénéfice des œuvres charitables de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD).
* Le Page (1902), pièce en un acte, en vers ;
* Le K.W.T.Z. (1905) ;
* Nono (1906), pièce en trois actes ;
* Chez les Zoaques (1906) ;
* La Clef (1907), qui connut un four ;
* Petite Hollande (1908), préface d’Octave Mirbeau ;
* Le Veilleur de nuit (1911) ;
* La Prise de Berg-Op-Zoom (1912) ;
* La Pèlerine écossaise (1914) ;
* Deux Couverts (1914) ;
* Une paire de gifles ;
* La Jalousie (1915) ;
* Faisons un rêve (1916) ;
* Jean de La Fontaine (1916) ;
* L’Illusionniste (1917) ;
* Un soir quand on est seul (1917) ;
* Deburau (1918) ;
* Pasteur (1919) ;
* Le Mari, la Femme et l’Amant (1919) ;
* Mon père avait raison (1919) ;
* Béranger (1920) ;
* Je t’aime (1920) ;
* Comment on écrit l’histoire (1920) ;
* Le Comédien (1921) ;
* Le Blanc et le Noir (1923) ;
* L’Amour masqué (1923), comédie musicale, musique de André Messager ;
* L’Accroche-cœur ;
* Un sujet de roman (1924), pièce inspirée par le couple d’Octave Mirbeau et Alice Regnault ;
* Mozart (1925), comédie musicale ;
* Désiré (1927) ;
* Mariette ou Comment on écrit l’histoire (1928), comédie musicale ;
* Histoires de France (1929) ;
* Franz Hals (1931) ;
* Villa à vendre (1931) ;
* Françoise (1932) ;
* Les Desseins de la providence (1932) ;
* Châteaux en Espagne (1933) ;
* Ô, mon bel inconnu (1933), comédie musicale ;
* Un tour au paradis (1933) ;
* Florestan Ier, prince de Monaco (1933) ;
* Le Nouveau Testament (1934) ;
* Quand jouons-nous la comédie ? (1935) ;
* La Fin du monde (1935) ;
* Le Mot de Cambronne (1936) ;
* Quadrille (1937) ;
* Dieu sauve le roi (1938) ;
* Un monde fou (1938) ;
* You’re telling me (1939) ;
* Florence (1939) ; remanié en 1949 sous le titre Toâ
* Une paire de Gilles (1939), en un acte ;
* Une lettre bien tapée (1939), en un acte ;
* Fausse Alerte (1939), en un acte ;
* Le Bien-aimé (1940) ;
* Vive l’empereur (1941) ;
* N’écoutez pas, mesdames (1942) ;
* Talleyrand (1947) ;
* Aux deux colombes (1948) ;
* Toâ (1949), c’est Florence remaniée ;
* Tu m’as sauvé la vie (1949) ;
* Beaumarchais (1950), pièce qui n’a pas été jouée ;
* Une folie (1951).
Tous les films (sauf exception) en tant que scénariste, dialoguiste et acteur. Les mentions d’adaptation de ses propres pièces, et leurs dates de première représentation, restent à relever.
* 1914 : Oscar rencontre Mademoiselle Mamageot - film de famille, inédit, de 3mn 50’ -
* 1915 : Ceux de chez nous (documentaire) La première version muette, durait 22 mn ; elle était destinée à être projetée accompagnée d’une causerie de Guitry. La version sonorisée date de 1939. La version finale remaniée, en 1952, dure 44 mn et crédite Frédéric Rossif comme collaborateur.
* 1922 : Une petite main qui se place - court épilogue filmé de la pièce homonyme -
* 1934 : Dîner de gala aux ambassadeurs - Documentaire de 5 mn
* 1935 : Pasteur co-réalisation avec Fernand Rivers
* 1935 : Bonne chance !
* 1936 : Le Nouveau Testament co-réalisateur : Alexandre Ryder
* 1936 : Le Roman d’un tricheur
* 1936 : Mon père avait raison
* 1936 : Faisons un rêve
* 1937 : Le Mot de Cambronne - (moyen métrage)
* 1937 : Désiré
* 1937 : Les Perles de la Couronne co-réalisateur : Christian Jaque
* 1937 : Quadrille
* 1938 : Remontons les Champs-Élysées collaboration technique : Robert Bibal
* 1939 : Ils étaient neuf célibataires
* 1941 : Le Destin fabuleux de Désirée Clary, collaboration technique : René Le Hénaff
* 1942 : La Loi du 21 juin 1907 - (court-métrage)
* 1944 : De Jeanne d’Arc à Philippe Pétain, mise en film du livre homonyme, 58 mn
* 1943 : Donne-moi tes yeux
* 1943 : La Malibran
* 1947 : Le Comédien
* 1948 : Le Diable boiteux
* 1949 : Aux deux colombes
* 1949 : Toâ
* 1950 : Tu m’as sauvé la vie
* 1950 : Le Trésor de Cantenac
* 1951 : Deburau
* 1951 : La Poison
* 1952 : Je l’ai été trois fois
* 1953 : La Vie d’un honnête homme (narrateur)
* 1953 : Si Versailles m’était conté...
* 1955 : Napoléon
* 1955 : Si Paris nous était conté...
* 1957 : Assassins et voleurs (n’apparaît pas dans le film)
* 1957 : Les trois font la paire ( Sacha Guitry apparaît pour la dernière fois, et seulement au générique)
(liste non exhaustive)
* Le Blanc et le Noir (1931), de Robert Florey et Marc Allégret ;
* L’Accroche-cœur (1938), de Pierre Caron ;
* Adhémar ou le jouet de la fatalité (1951), réalisé par Fernandel - Sacha Guitry (malade n’a pas pu superviser l’œuvre selon ses souhaits) scénariste et dialoguiste seulement ;
* 1935 : Poste Parisien : Premier spectacle de télévision de Maurice Diamant-Berger - court métrage -
* 1951 : Le musée de Sacha Guitry de Stéphane Prince - court métrage -
(liste non exhaustive)
* 1910 La Correspondance de Paul Roulier-Davenel, Dorbon aîné. (Réédition : Éditions Bernard de Fallois, prévue janvier 2009)
* 1930 Lucien Guitry raconté par son fils, Raoul Solar
* 1931 La Maison de Loti, Paillart
* 1935 Mémoires d’un tricheur, Gallimard NRF
* 1947 Quatre ans d’occupation, Éditions de l’Élan
* 1947 Toutes réflexions faites, Éditions de l’Élan
* 1949 60 jours de prison (fac-similé du manuscrit, illustré par des dessins de l’auteur), Éditions de l’Élan
* 1979 Le petit carnet rouge et autres souvenirs inédits, Perrin
Liste non exhaustive :
* La Vie à deux (1958), de Clément Duhour, adapté de cinq pièces de Sacha Guitry ;
(Désiré,
L’Illusionniste,
Une paire de gifles,
Le Blanc et le Noir et Françoise) reliées entre elles par un scénario-prétexte. On ne sait quelle fut la part exacte de Guitry dans l’écriture des séquences de liaison (probablement le fait de son secrétaire Stéphane Prince, lequel se cacherait derrière le mystérieux Jean Martin crédité par le générique comme coscénariste).
Les affiches du film présentent La Vie à deux comme le dernier film de Sacha Guitry... lequel mourut près d’un an avant le début du tournage ;
* Au voleur ! (1960), de Ralph Habib, d’après un scénario original inédit, remanié et adapté par Jean-Bernard Luc ;
* Beaumarchais l’insolent (1995), d’Édouard Molinaro, adapté de la pièce inédite Beaumarchais et du scénario inédit lui aussi Franklin et Beaumarchais ;
* Désiré (1996), de Bernard Murat, d’après la pièce et le film éponymes ;
* Quadrille (1997), de Valérie Lemercier, d’après la pièce et le film éponymes ;
* Le Comédien (1996), de Christian de Chalonge, d’après la pièce et (toutes proportions gardées) le film éponymes ;
* Un crime au paradis (2000), de Jean Becker, remake du film La Poison, avec Josiane Balasko, Jacques Villeret et André Dussolier. L’action a été librement transposée du début des années 50 à l’aube des années 80.
Sacha Guitry apparait également en tant qu’acteur au générique de deux films muets, l’un de 1917 (Un roman d’amour et d’aventures, dont il a également écrit le scénario) et l’autre de 1922 (épilogue filmé de sa pièce Une petite main qui se place), mais encore, si l’on s’en réfère à un article paru dans la presse télé au début des années 1980 et à la filmographie établie par Claude Gauteur et André Bernard (dans la réédition 1984 de l’ouvrage Sacha Guitry, le Cinéma et Moi), dans La Huitième Femme de Barbe-Bleue (Blue Beard’s Eighth Wife) (1938), d’Ernst Lubitsch.
Ces deux sources mentionnent également la présence de Geneviève de Séréville aux côtés de son futur mari durant ce caméo furtif. Néanmoins, dans la copie de la version américaine sous-titrée, le couple n’apparaît pas à l’image.
* Si ceux qui disent du mal de moi savaient exactement ce que je pense d’eux, ils en diraient bien davantage !
* Je n’ai qu’une seule ambition : ne pas plaire à tout le monde. Plaire à tout le monde c’est plaire à n’importe qui.
* On peut faire semblant d’être grave, on ne peut pas faire semblant d’avoir de l’esprit.
* Ce qui ne me passionne pas m’ennuie.
* Etre riche ce n’est pas avoir de l’argent - c’est en dépenser.
* Il y a des gens sur qui on peut compter. Ce sont généralement des gens dont on n’a pas besoin.
* On n’est pas infaillible parce qu’on est sincère.
* A quoi bon apprendre ce qui est dans les livres, puisque ça y est ?.
* -Me donneriez-vous vingt-cinq ans ? - Si j’avais vingt-cinq ans, je les garderais pour moi.
* On parle beaucoup trop aux enfants du passé et pas assez de l’avenir - c’est-à-dire trop des autres et pas assez d’eux-mêmes.
* Le jour où l’on vous traitera de parvenu, tenez pour certain le fait que vous serez arrivé.
1. ↑ « Pourquoi je suis né » [archive]
2. ↑ a b Sacha Guitry, cinéaste. Ed Yellow Now, 1993
3. ↑ Dominique Desanti évoque « une réussite maintenue à travers l’horreur de l’occupation, comme si de préserver les succès et le luxe de Guitry était nécessaire à la survie de la France ». Sacha Guitry. Grasset, 1982
4. ↑ « Plus que les goûts même de Guitry, c’est plutôt comme une vaste déclinaison de gloires que ce film apparaît, et l’assez naïf rempart de leur protection. » Philippe Arnaud, Sacha Guitry, cinéaste. Ed Yellow Now, 1993
5. ↑ Dominique Desanti. Sacha Guitry. Grasset, 1982
6. ↑ Alain Keit. Le cinéma de Sacha Guitry. Vérités, mensonges, simulacres. Éditions du Céfal, 2002
7. ↑ Cahiers du Cinéma, N°173, déc. 1965, Spécial Guitry-Pagnol
8. ↑ « Sacha Guitry fut un vrai cinéaste, plus doué que Duvivier, Grémillon et Feyder, plus drôle et certainement moins solennel que René Clair. Guitry est le frère français de Lubitsch ». F. Truffaut, Les Films de ma vie. 1975
9. ↑ Journal du Dimanche, Jeudi 10 janvier 2008
sources : wikipedia
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