lundi 19 novembre 2018, par
Aux alentours des années 1875-1880, deux grandes questions se posaient dans les milieux militaires des différentes nations ; d’une part l’adoption pour l’infanterie d’armes à répétition et d’autre part l’opportunité d’une nouvelle réduction de calibre, au-dessous de 10 mm.
Ces questions faisaient débat, car l’adoption d’armes à répétition et de petit calibre nécessitait une refonte totale de la tactique militaire.
Un fait historique allait forcer la décision ; la bataille de Plevna en septembre 1877. C’est là que pour la première fois sur un champ de bataille européen opposant russes et turcs, les armes à répétition firent leur apparition. Ces dernières (des carabines de cavalerie Winchester 1866), utilisées par les soldats turcs fortement retranchés aux abords de la ville, mirent littéralement en pièces la masse des troupes russes par un feu de salve intense et à courte portée. La preuve était faite : le fusil à un coup avait vécu.
Restait la question de la réduction de calibre, rendue difficile du fait de l’encrassement important résultant du tir à poudre noire ; mais en 1884, l’inspecteur général des Poudres et Salpêtres Paul Vieille (1854-1934), parvint à mettre au point une poudre brûlant sans quasiment laisser de résidus et ne produisant que très peu de fumée. Cette poudre, naturellement dite « poudre sans fumée » avait de plus une puissance trois fois supérieure à celle de la poudre noire.
La solution définitive au problème des armes de petit calibre venait d’être trouvée.
On décida immédiatement d’adopter cette nouvelle poudre (produite en secret et camouflée sous le nom de « Poudre V » ou « Poudre B ») pour le chargement de la cartouche d’un nouveau fusil à répétition dont le calibre serait réduit à 8 mm.
Une commission d’étude existait pour étudier la mise au point d’armes nouvelles ; sous la présidence du général Tramond, elle était composée des colonels Bonnet et Lebel, du colonel Gras, du capitaine Desaleux et de M. Vieille.
Nommé ministre de la Guerre en janvier 1886, le bouillonnant général Boulanger exige de la commission des résultats immédiats, et que le nouveau fusil réglementaire lui soit présenté pour le 1er mai de la même année !
Bien entendu, il n’est alors plus question d’étudier la mise au point d’une arme entièrement nouvelle, mais de produire au plus vite et le mieux possible, à partir de ce que l’on possède déjà.
La seule solution est la réduction au calibre de 8 mm du fusil modèle 1885, fusil à répétition doté d’un magasin longitudinal sous le canon (système Kropatschek), adopté depuis peu mais dont la fabrication avait été limitée, sa munition de 11 mm à poudre noire le rendant déjà quasiment obsolète.
Le tour de force est réalisé et l’arme est prête dans les délais impartis, les premiers exemplaires sont rapidement essayés dans la troupe et le nouveau fusil est adopté au début de 1887.
On le désigne sous le nom de « Fusil Modèle 1886 », mais c’est sous le nom de fusil Lebel qu’il restera connu et deviendra célèbre. Le colonel Lebel, commandant de l’École normale de Tir de Châlons, n’était qu’un des membres de la « Commission des Armes à répétition », mais c’est son nom qui passa à la postérité.
La commission décida en outre que, pour la première fois dans l’histoire de l’armement, toutes les pièces de la nouvelle arme devraient être rigoureusement interchangeables ; cela impliquait qu’elles soient usinées en manufacture et en très grande série, ce, sur les plus modernes des machines-outils (provenant spécialement des États-Unis).
Le résultat est une arme superbe dont la qualité de finition et les lignes élégantes forcent l’admiration de tous. Le fusil Lebel est sans conteste l’un des plus beaux fusils jamais construits et la cartouche qu’il tire le met, en 1887, au premier rang des armes militaires mondiales.
Légèrement modifié en 1893 (cf infra), le Lebel sera le symbole du poilu français de la Première guerre Mondiale.
Baïonnette lebel dite "Rosalie " le fusil étant lui même surnommé "Oscar"
Le fonctionnement du fusil 1886 (et 1886 M93) :
1° Garnir le magasin : placer le sélecteur de tir (bouton quadrillé) sur la position « répétition », ouvrir la culasse mobile et dégager l’ouverture du tube magasin en appuyant avec le pouce sur l’auget-transporteur. Introduire une par une 8 cartouches à la suite, en placer une 9ᵉ dans l’auget-transporteur.
2° Tir à répétition : tirer vivement la culasse vers l’arrière, l’auget-transporteur se relève et la cartouche qui s’y trouve est mise en place en face de la chambre. En refermant la culasse, la cartouche est poussée dans la chambre, au moment du verrouillage de la culasse, l’auget s’abaisse automatiquement et reçoit la première cartouche du magasin. Après le départ du coup, le simple fait d’ouvrir la culasse éjecte l’étui vide et fait remonter l’auget-transporteur qui présente une nouvelle cartouche en face de la chambre.
3° Tir coup par coup : Si l’on veut conserver le magasin rempli, il suffit de pousser le sélecteur sur la position « coup par coup ». L’auget-transporteur se trouve alors bloqué en permanence en position haute. Le tir s’effectue alors comme avec un fusil à un coup, en introduisant à chaque fois une cartouche directement dans la chambre.
Ce mécanisme compliqué nécessite un très grand soin dans la fabrication et l’ajustage de ses pièces et est sujet aux enrayages lorsque le fusil est utilisé dans la boue ou la neige ; il est néanmoins parfaitement au point dans le fusil 1886 M93.
Une fois le magasin rempli à 8 cartouches, le tir en répétition est très rapide, mais le rechargement du magasin est très long, ce qui fait que la vitesse moyenne de tir d’un fusil à magasin tubulaire du type Kropatschek n’est guère supérieure à celle obtenue avec une arme à un coup.
Longueur totale : 1,307 m sans baïonnette ; 1,82 m avec sa baïonnette.
Longueur du canon : 0,800 m.
Calibre : 8 mm.
Poids : 4,18 kg, magasin vide.
Epée-baïonnette à lame quadrangulaire à pans évidés, longueur totale : 0,638 m.
Système de répétition : magasin de 8 cartouches en ligne sous le canon.
Canon rayé de 4 rayures à gauche, pas de 24 cm.
Hausse à gradins et planchette : gradins correspondant aux distances comprises entre 400 et 800 mètres. But en blanc de 250 mètres avec planchette de hausse rabattue vers l’avant. Le curseur porte un troisième cran de mire utilisé pour les distances de 900 à 2 400 mètres lorsque la planchette est relevée.
Le canon et la boîte de culasse sont soigneusement bronzés, la culasse mobile est en acier poli. L’épée-baïonnette a la forme d’une longue aiguille, elle est composée d’une lame quadrangulaire en acier poli, d’une poignée entièrement métallique et d’une croisière avec douille et quillon en acier. Le fourreau est bronzé.
Modification de 1893 : Elle consiste essentiellement dans l’adjonction d’un « tampon-masque » sur la tête de culasse, pour mieux protéger le tireur contre d’éventuelles projections de gaz suite à rupture de culot de la cartouche, et dans l’adoption d’un pied à griffes pour la hausse. Cette transformation a été systématiquement apportée aux fusils 1886 qui prirent alors leur appellation définitive de « Fusil 1886 M93 ».
Bill1964
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