jeudi 5 avril 2007, par
Hannibal fait subir au territoire situé entre Cortone et le lac Trasimène tous les fléaux et les ravages de la guerre, pour exciter davantage l’ennemi à venger, dans sa colère, les outrages infligés à ses alliés. Il était déjà parvenu à un endroit fait pour une embuscade, celui où le pied des monts de Cortone est le plus près du lac Trasimène. Il n’y a entre eux qu’un chemin très étroit, comme si, à dessein, on n’avait laissé de place que pour lui ; ensuite s’étend une plaine un peu plus large ; puis les montagnes s’élèvent. Hannibal place là, à découvert, un camp qu’il occupera lui-même avec les Africains et les Espagnols seulement ; les Baléares et le reste de l’infanterie légère, il les fait conduire derrière les monts ; les cavaliers, il les met à l’entrée même du défilé, bien cachés par des hauteurs, pour qu’une fois les Romains entrés dans cette plaine, la cavalerie barrant la route derrière eux, tout le reste leur soit fermé par le lac et les montagnes.
Flaminius, arrivé au lac la veille, au coucher du soleil, le lendemain, sans envoyer d’éclaireurs, le jour à peine levé, ayant franchi la passe, ne vit, quand sa colonne commença à s’étendre dans la plaine découverte, que ce qu’il avait d’ennemis en face de lui ; derrière lui, au-dessus de lui, il ne découvrit pas l’embuscade. Le Carthaginois, lui, quand il tint, comme il l’avait cherché, son ennemi enfermé par le lac et les montagnes et entouré par ses troupes, donne à toutes en même temps le signal de l’attaque. Quand, chacune au plus près, elles descendirent en courant, leur attaque fut, pour les Romains, d’autant plus soudaine et inattendue, qu’un brouillard, s’élevant du lac, s’étendait plus épais sur la plaine que sur les monts, et que les colonnes ennemies, venant de plusieurs collines, se voyaient assez bien entre elles et avaient chargé avec plus d’ensemble. Ce fut le cri poussé de tous côtés qui apprit au Romain, avant qu’il pût le voir, qu’il était cerné ; et l’on commença à se battre sur le front et sur les flancs avant d’avoir eu le temps de bien ranger les lignes, de s’armer et de tirer l’épée.
Eugène Lasserre, Tite-Live, Histoire romaine, t. IV, Paris, Garnier, 1937 ;
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