mardi 19 mai 2015, par
Sur le Repulse, Tennant, regardant le navire amiral donner de la bande, vit monter le signal « je ne suis plus maître de ma manoeuvre », mais il n’eut pas le temps de se porter à son aide, car, à midi, son propre navire fut également attaqué, à la fois par bombardiers d’altitude et par avions-torpilleurs. Chacun, sur le Repulse, s’efforça, de briser l’attaque japonaise, en portant la puissance de feu à son maximum.
Une pluie de bombes s’abattit autour du bâtiment mais, par miracle, aucune ne l’atteignit. Elles s’égaillèrent dans un rayon de cent mètres autour du Repulse, soulevant des geysers d’écume, qui noyaient le pont et trempaient les marins. Ensuite les torpilles tracèrent leurs inquiétants sillages sur la mer. « Au fur et à mesure qu’il les apercevait, Tennant manoeuvrait calmement, leur présentant l’arrière suivant la parade normale « à droite 25... à gauche 25... à droite 25... ». Les hommes de barre exécutaient ses ordres, le bâtiment virait et gîtait, quelques matelots perdaient un peu l’équilibre, le bâtiment se redressait, puis virait et gîtait à nouveau ; bref le grand bâtiment esquivait les torpilles avec l’apparente aisance d’un petit hors-bord. Et à 12 h 14, les avions assaillants n’avaient plus ni bombe ni torpille, Tennant signala à l’amiral : « Venons d’esquiver 19 torpilles, avec l’aide de Dieu. »
Les manoeuvres de Tennant l’avaient entraîné loin au sud du Prince of Wales, toujours en difficulté. Il diminua de vitesse et se rapprocha du vaisseau amiral pour lui porter secours. Il prit l’initiative de prévenir Singapour que la force Z était attaquée.
Mais de nouvelles vagues de bombardiers apparaissaient au loin et, cette fois-ci, aucun navire ne fut épargné. L’ennemi toucha quatre fois le Prince of Wales avec ses torpilles, dont une l’atteignit encore à l’arrière, mais à tribord cette fois-ci. Touché des deux côtés, le bateau parut réduire sa gîte, équilibré par le poids de l’eau qui s’engouffrait dans chacun de ses flancs. Mais il était bas sur l’eau et s’enfonçait visiblement par l’arrière.
Le Repulse, lui aussi, était attaqué à la torpille, mais cette fois des deux bords, si bien que Tennant, lorsqu’il manoeuvrait pour éviter une gerbe de torpilles, ne pouvait que présenter le travers du Repulse à la gerbe venant de l’autre bord. Une torpille le frappa à 18 mètres à l’arrière de la passerelle et quatre autres suivirent, trois à bâbord et une à tribord. Aussitôt, le bâtiment donna de la bande et Tennant, qui connaissait assez son navire pour savoir qu’il ne survivrait pas à ses blessures, ordonna aussitôt : « Gonflez vos ceintures de sauvetage », puis : « Tout le monde sur le pont. Préparez-vous à abandonner le navire. »
Aussitôt, les hommes surgirent des ponts inférieurs avec discipline et en bon ordre ; ceux qui avaient été blessés lors de la première attaque étant soutenus ou portés par leurs camarades. Puis vint l’ordre : « Abandonnez le navire », et les marins commencèrent à sauter ou à plonger par-dessus bord ; d’autres se laissaient glisser le long des flancs inclinés du navire. La discipline ne se relâcha pas une seconde pendant toute l’opération. Un jeune marin essaya bien de remonter une file d’hommes qui attendaient pour descendre sur le gaillard d’arrière, mais un enseigne lui tapa sur l’épaule et lui dit calmement : « Allons, allons, nous aussi, nous allons par là. » Le jeune homme se ressaisit alors et reprit sa place dans la file.
Il y eut quelques sauvetages spectaculaires mais aussi beaucoup de pertes. Un homme plongea de la tour de commande de défense, haute de 50 mètres, et s’éloigna du navire à la nage ; un autre voulut en faire autant mais ne put s’écarter assez du navire et vint s’écraser sur le pont. Un autre encore manqua ’son plongeon et s’engouffra dans la cheminée. Même en bas, sur les ponts, certains ne purent s’échapper : un officier sauta par-dessus bord, mais comme le bateau gîtait fortement, il ne put atteindre l’eau, tomba dans un trou ouvert par une torpille et mourut noyé dans les entrailles du Repulse. Un groupe de fusiliers marins courut à l’arrière, où le bateau était plus bas sur l’eau, plongea et fut broyé par les pales des hélices qui tournaient encore.
A 12 h 33, le Repulse, qui avait englouti plus d’eau qu’il ne pouvait en supporter, souleva son avant « comme une flèche d’église », selon le témoignage d’un rescapé, et s’enfonça dans la mer, aspirant avec lui de nombreux marins qui essayaient de s’éloigner à la nage et laissant une nappe de pétrole chaud et visqueux qui recouvrit tout ce qui flottait et étouffa plus d’un homme.
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