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Ambassade Romaine à Carthage

, par

Arrivée de l’ambassade romaine

Le combat avait été longtemps indécis. Les Sagontins sentaient redoubler leur ardeur, parce qu’ils résistaient contre toute espérance ; et les Carthaginois se croyaient vaincus, parce qu’ils n’avaient pu vaincre, (2) lorsque tout à coup les assiégés poussent un cri, et font reculer l’ennemi jusqu’aux ruines du mur. Le désordre, la confusion est dans ses rangs ; il s’ébranle ; enfin il fuit, il est en déroute et chassé dans ses lignes. Cependant on annonce l’arrivée de la députation romaine. Hannibal envoie à sa rencontre jusqu’à la mer, afin de lui signifier qu’il n’y a point de sûreté pour elle à s’avancer au milieu d’une foule de nations sauvages qui ont les armes à la main ; que, pour lui, dans une conjoncture si critique, il ne peut donner audience à des ambassadeurs. Il était clair qu’après ce refus, ils iraient droit à Carthage : aussi, pour les prévenir, une lettre, un courrier, sont expédiés aux chefs de la faction Barcine, qui, d’avance, doivent disposer les esprits à rejeter toutes les concessions que le parti contraire pourrait faire aux Romains.

Audience de l’ambassade romaine à Carthage

Cette fois les députés furent admis et entendus, mais encore sans fruit et sans succès. Hannon seul, malgré l’opposition du sénat, parla en faveur du traité : il se fit un grand silence, tant l’orateur imposait à l’assemblée qui ne partageait point son avis. "Au nom des dieux, arbitres et garants des traités, il les avait avertis, conjurés de ne point envoyer à l’armée le fils d’Amilcar. Les mânes, le rejeton d’un tel homme, s’indignent du repos ; et jamais, tant qu’il restera quelqu’un de la race ou du nom de Barca, l’alliance avec Rome ne sera paisible. Un jeune homme brûlait du désir de régner ; une seule voie, à ses yeux, pouvait le conduire au trône, c’était de semer guerres sur guerres, de vivre toujours entouré d’armes et de légions. Eh bien ! vous avez alimenté ce foyer terrible ; Hannibal est à la tête de vos armées. Vous seuls avez donc allumé l’incendie qui vous dévore. Vos soldats ont mis le siège devant Sagonte, d’où les écarte un traité solennel. Bientôt Carthage verra sous ses murs les légions romaines, guidées par les mêmes dieux, qui, dans la guerre précédente, ont vengé les infractions des traités. Méconnaissez-vous donc, et vous et votre ennemi, et la fortune de l’un et de l’autre peuple ? Des ambassadeurs venaient dans votre camp pour des alliés et au nom des alliés ; votre digne général a refusé de les recevoir ; il a foulé au pied le droit des gens. Cependant chassés comme ne l’ont jamais été les envoyés même d’un peuple ennemi, ils se rendent près de vous ; ils vous demandent satisfaction d’après le traité. Ils n’accusent point la nation ; ils inculpent un seul homme ; ils réclament un seul coupable. Plus ils agissent avec douceur, plus ils procèdent lentement, plus il est à craindre qu’ils ne déploient, dans la suite, une rigueur inflexible. Rappelez-vous les îles Aegates, le mont Eryx, et tous les désastres, qui, pendant vingt-quatre ans, vous ont accablés sur terre et sur mer. Alors vous n’aviez point pour chef un enfant comme Hannibal, mais un Amilcar, son père, un autre Mars pour parler le langage de ses partisans. Tarente, ou plutôt l’Italie, fut attaquée par nous contre la foi jurée ; Sagonte l’est de même aujourd’hui. Aussi les hommes et les dieux se réunirent contre nous ; des querelles de mots élevées sur les premiers infracteurs du traité cédèrent à l’événement de la guerre, qui, juge équitable, fit pencher la victoire du côté de la justice. C’est contre Carthage qu’Hannibal fait avancer aujourd’hui ses tours et ses mantelets ; ce sont les murs de Carthage que battent ses béliers. Les ruines de Sagonte (puissent les dieux détourner ce présage !) retomberont sur nos têtes, et la guerre que nous lui déclarons, nous aurons à la soutenir contre Rome. Faut-il donc livrer Hannibal, me dira-t-on ? Je sais que l’inimitié que je portais au père peut rendre vaines mes allégations contre le fils. Mais je n’ai pas vu sans plaisir la fin d’Amilcar, parce que, s’il existait encore, nous aurions déjà la guerre avec les Romains ; et partant, ce jeune Hannibal, cette espèce de furie qui agite la torche des combats, je le hais et le déteste ? Livrons-le, croyez-moi, comme victime expiatoire d’un attentat à la foi jurée ; et lors même que personne ne le réclamerait, il nous faudrait encore l’exiler aux dernières extrémités du monde, et le reléguer si loin, que son nom et sa renommée ne pussent arriver jusqu’à nous, et troubler le repos de la patrie. Mon avis est donc qu’on envoie sur-le-champ une ambassade à Rome, pour donner satisfaction au sénat ; une autre à Hannibal, pour lui signifier de lever le siège de Sagonte, et pour le livrer lui-même aux Romains, en exécution du traité ; une troisième enfin, pour rendre aux Sagontins tout ce qu’on leur a pris. "

Échec des négociations

Après le discours d’Hannon, personne ne chercha à lui répondre en forme, tant la majorité du sénat était pour Hannibal ! On reprochait même à Hannon d’avoir parlé avec plus d’aigreur que Flaccus Valérius, le député romain. Voici la réponse que reçut l’ambassade : "La guerre est venue des Sagontins, et non pas d’Hannibal. Le peuple de Rome commettrait une injustice, s’il préférait les Sagontins aux Carthaginois ses plus anciens alliés." Tandis que les Romains perdent le temps à envoyer des députations, Hannibal, dont les troupes étaient fatiguées par les combats et les travaux, accorda quelques jours de repos, après avoir confié à plusieurs détachements la garde des mantelets et des autres ouvrages. Cependant il excite les courages, et par la haine de l’ennemi, et par l’espoir des récompenses. Bientôt il a déclaré dans une assemblée que tout le butin, après la prise de Sagonte, appartiendrait aux soldats ; alors telle fut leur ardeur, que, si le signal eût été donné à l’instant même, aucun obstacle n’eût semblé capable de les arrêter. (5) Les Sagontins, durant la suspension d’armes, qui arrêta quelque temps toute attaque de part et d’autre, ne cessèrent de travailler jour et nuit à relever un nouveau mur à l’endroit où la brèche avait laissé leur ville ouverte. Dès lors le siège recommença avec plus d’acharnement ; mais où porter les premiers secours ? de ce côté ? de cet autre ? Mille cris confus empêchaient les Sagontins de le savoir. Une tour mobile, dont la hauteur surpassait toutes les fortifications de la ville, s’avançait, et Hannibal était là pour tout animer de sa présence : Arrivée au pied de la muraille, la tour, au moyen des catapultes et des balistes disposées à tous les étages, eut bientôt renversé les combattants et dégarni les remparts ; alors Hannibal saisit l’occasion, et envoie environ cinq cents Africains avec des haches pour saper le mur par le bas, travail peu difficile, parce que les pierres n’étaient point unies par de la chaux durcie, mais seulement par de la terre détrempée, suivant l’ancienne méthode de construction. Aussi n’était-ce pas seulement l’endroit sapé qui s’écroulait, et de larges ouvertures vomissaient dans Sagonte les bataillons carthaginois. Ils s’emparent d’une hauteur, y placent des catapultes et des balistes et, pour se faire, dans la place même, une sorte de boulevard qui domine tout le reste, ils élèvent une muraille autour de la hauteur. De leur côté, les Sagontins construisent un mur dans la partie intérieure de la ville, qui n’est pas encore au pouvoir d’Hannibal. De part et d’autre, activité extrême à défendre, à combattre ; mais ces remparts intérieurs, dont s’entourent les assiégés, resserrent, de jour en jour, Sagonte dans l’espace le plus étroit. En proie à un dénuement affreux, suite d’un long siège, ils voient s’évanouir l’espoir d’un secours étranger ; Rome, leur unique ressource, est si loin d’eux ; tout le pays d’alentour appartient à l’ennemi. Cependant un peu de courage ranima les esprits abattus, à la nouvelle du départ précipité d’Hannibal qui marchait contre les Orétans et les Carpétans. Ces deux peuples, effrayés de la rigueur avec laquelle on poussait les levées, avaient arrêté les agents d’Hannibal. Il craignait un soulèvement ; sa rapidité le prévint, et les rebelles eurent bientôt déposé les armes.


Eugène Lasserre, Tite-Live, Histoire romaine, t. IV, Paris, Garnier, 1937

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