lundi 30 mars 2015, par
C’est en moyenne et haute région tonkinoise que se trouve l’essentiel des forces françaises dans lesquelles on compte un seul régiment blanc — avec un peu d’autochtones , le 5e régiment étranger d’infanterie (5e R.E.I.). Toutes les autres formations comportent une proportion notable d’Indochinois : encore assez peu au 9e régiment d’infanterie coloniale (9e R.I.C.), davantage dans les " régiments mixtes d’infanterie coloniale » (R.M.I.C.) et au 4e régiment d’artillerie coloniale (R.A.C.). Dans les régiments de tirailleurs tonkinois (R.T.T.), les officiers, à quelques exceptions près, et une partie des sous-officiers sont français, ainsi que quelques hommes de troupe (spécialistes). Les effectifs indochinois proviennent en grande partie du delta tonkinois, mais on trouve, dans tous les régiments, des ressortissants des minorités ethniques, montagnards de la frontière sino-tonkinoise ou même, au 16e R.M.I.C., des " rhadés », également montagnards, mais originaires des plateaux du Sud-Annam, à plusieurs centaines de kilomètres au sud. Vietnamiens du delta et minoritaires de toute provenance ne sont vraiment à l’aise que dans leur région d’origine, sauf les tirailleurs déjà anciens en service.
Le relief des régions où se déroulent les opérations est très accentué et si le fleuve Rouge, à Lao Kay — à 500 kilomètres de la mer n’est qu’à l’altitude de 80 mètres, les crêtes déchiquetées du Fan Si Pan, entre le fleuve Rouge et la rivière Noire, au sud de Lao Kay, culminent à plus de 3 000 mètres. La forêt, dense dans les vallées basses, rend toute circulation impossible en dehors des routes et des pistes. Cependant, dès que l’on s’élève, les pentes, déboisées par les montagnards, autorisent des déplacements à travers des peuplements moins épais. Là où les arbres disparaissent, l’herbe à paillote (le " tran ") interdit pratiquement toute vue et rend, de nouveau, la circulation malaisée. Les routes, aux caractéristiques très modestes, sont d’une densité relativement médiocre — 8 318 kilomètres pour tout
le Tonkin (116 000 km’ dont 15 000 km’ de delta assez bien desservis), dont 3 859 seulement sont empierrés ou asphaltés (1 266) et utilisables toute l’année. Les ponts, sur les cours d’eau importants, sont rares et les bacs en nombre limité. De nombreuses rivières doivent être franchies à gué — en saison sèche — ou par d’autres moyens (sampans, radeaux). La saison sèche, en moyenne et haute région tonkinoise, se termine vers la mi-avril. Sur les pistes, le cheval — sellé ou bâté — est d’une utilisation courante.
Les moyens radio de l’armée française, enfin, sont très insuffisants malgré les renforcements venus de l’extérieur au cours des derniers mois. Dans la plupart des cas, ils ne permettent que des liaisons avec l’extérieur — Kumming ou Calcutta. Rares sont les liaisons de chefs à subordonnés et encore moins celles des subordonnés entre eux, sauf par téléphone, avec tous ses inconvénients. Le message lesté est encore d’un emploi courant, quand on dispose d’un avion. La phonie est inexistante.
Le groupement du fleuve Rouge (G.F.R.), sous le commandement du général Alessandri, est à cheval sur le fleuve Rouge (voir carte) dans la région Tong-Son Tay-Viet Tri avec deux bataillons au nord du fleuve (4/19e
R.M.l.C. et 3/5e R.E.l.). Les légionnaires sont cantonnés à Cotich — le 3/5e — et à Viet Tri (état-major du régiment et personnel de commandement).
Au sud du fleuve se trouvent les deux autres bataillons du 5e R.E.1., un bataillon du 1er R.T.T. et un du 4e R.T.T. L’artillerie du groupement compte trois batteries (4e R.A.C.), dont une tractée. Relèvent également du G.F.R. : le D.M.C. (détachement motorisé colonial), un peloton moto, le groupe aérien d’observation (25 Potez au terrain de Tong) et une section du détachement porté de la base aérienne de Bac Mai (personnels de l’armée de l’air qui seront utilisés comme fantassins).
La mission confiée au G.F.R. est double : tenir la boucle du fleuve Rouge de Son Tay à Hung Hoa pour défendre le plus longtemps possible le terrain d’aviation de Tong, un des rares grands terrains que les Nippons ne contrôlent pas en vertu des accords. Cette mission ne se justifie que dans l’hypothèse d’une utilisation rapide du terrain par des renforts venus de l’extérieur car, pour le conserver, le G.F.R. serait dans l’obligation de livrer un combat défensif adossé à deux cours d’eau importants — fleuve Rouge et rivière Noire — très difficiles à franchir. G.F.R risquerait donc une destruction complète, dès cette première bataille, ce qui incompatible avec la deuxième mission qui I est confiée : actions de guérilla à l’ouest de rivière Noire.
Alerté dans la nuit du 8 au 9 mars, le général Alessandri rencontre le général Sabattier son arrivée à Tong au cours de la même nuit Une modification importante sera apportée la mission du groupement qui doit, désormais tenir une tête de pont dans la boucle du fleu Rouge pour permettre le franchissement fleuve à Chien Dong et de la rivière Noire Trung Ha. La mission de guérilla reste inchangée. Avant de rejoindre son P.C. de Phu Doan, le général Sabattier précise que le nou veau dispositif devra être en place le 9 ma dans l’après-midi « sauf amélioration de I situation générale ». L’ordre de fin d’alerte diffusé par Hanoi interrompt donc les préparatifs et les troupes regagnent leurs cantonnements.
Le 9 mars, à 20 heures, l’alerte est donné par Hanoi et répercutée par téléphone, d Tong, à toutes les unités. Le dispositif prévu se met en place dans la nuit et les points de franchissement (Trung Ha et Chien Dong) sont aménagés. Le 10 mars, au lever du jour, les emplacements de combat prévus pour le 2/4e R.T.T. restent inoccupés. Le bataillon, cantonné à Son Dong, s’est fait surprendre de nuit, en cours de déplacement, et a été dispersé. Le trou créé dans le dispositif est colmaté vaille que vaille.
Fait plus grave : la garnison de Viet Tri état-major du 5e R.E.I. et éléments de protection — a été neutralisée par surprise par les Japonais dans la matinée du 10. Viet Tri, Son Tay et Phu Tho aux mains des Nippons, le passage de Chien Dong devient inutilisable. Le 3/5e R.E.I., quoique également surpris, vers 10 heures, dans ses cantonnements de Cotich, parvient à se dégager, au prix de pertes sévères, et réussit à franchir le fleuve, de nuit, pour rejoindre nos forces.
Pierre Célerier historia magazine 2eme guerre mondiale 1968
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