vendredi 24 avril 2015, par
Pour le futur Henri IV commence dès lors la troisième partie du triptyque : prétention, confirmation, consécration. La tâche est d’autant plus difficile à réaliser qu’à l’image de Charles VII, « roi de Bourges », face aux Anglais, Henri n’est en fait que le « roi des huguenots du Sud-Ouest », même s’il est venu mettre le siège devant Paris aux côtés du défunt souverain.
Le tout-puissant Philippe II d’Espagne fournit hommes, armes et subsides à la Ligue, dirigée par le duc de Mayenne, car il caresse l’espoir de faire un jour monter sur le trône de France sa fille Isabelle, petite-fille d’Henri II par sa mère. C’est à la fois pour le Béarnais un inconvénient et un avantage. Inconvénient, car la puissance ibérique se trouve à son zénith ; avantage, parce que nombre de catholiques français (et le duc de Mayenne est de ceux-là) redoutent de voir une mainmise espagnole sur la France. Une réaction patriotique se devine en effet, et Henri a l’habileté de faire, le 4 août 1589 à Saint-Cloud, une déclaration aux termes de laquelle il prend l’engagement de maintenir la religion romaine dans le royaume, de se faire instruire dans cette foi, tout en maintenant les édits de ses prédécesseurs quand aux garanties accordées naguère aux réformés.
C’est là une initiative judicieuse qui révèle, si besoin était, les qualités politiques du nouveau roi de France. Mais il lui reste à devenir roi des Français. Le cardinal de Bourbon, son oncle, est devenu, en effet, pour la Ligue « Charles X », alors que le duc de Mayenne se dit lieutenant général du royaume. Un échec cuisant essuyé à Arques*, près de Dieppe, le 21 septembre 1589, révèle à celui-ci ses limites autant que l’habileté tactique de son adversaire. Une nouvelle défaite, subie à Ivry* cette fois, sur les bords de l’Eure, le 14 mars suivant, confirme l’emprise d’Henri IV, le chef « au panache
blanc », sur les provinces de l’Ouest. Mais Henri échoue devant Paris, ravitaillé par les Espagnols du duc de Parme après quatre mois de siège.
Une nouvelle tentative, par la ruse, échoue en janvier 1591 lors de la journée des Farines*, les assiégeants se faisant passer pour des meuniers. La guerre traîne en longueur. L’emprise de la Ligtie sur Paris et Rouen contrebalance des succès royaux dans le pays de Caux, en Champagne, en Dauphiné et en Provence. Si les états généraux, convoqués par le duc de Mayenne en 1593, repoussent finalement la candidature d’Isabelle d’Espagne et révèlent du même coup la division du camp catholique, si Henri de Navarre enregistre des ralliements à sa cause, sa légitimité ne lui suffit pas, pas plus que la force de son armée. Il lui faut accomplir un acte politique. Le Béarnais finit par s’en convaincre, acte qui ne peut être autre chose qu’une abjuration solennelle. Le pays l’attend, las d’une guerre ruineuse et d’une désunion qui déchire le royaume depuis maintenant plus d’une trentaine d’années. Gabrielle d’Estrées, favorite avisée, l’y pousse de toute son influence. En ridiculisant l’acharnement de la Ligue, les auteurs de la Satire Ménippée, en cours de réalisation, ne font qu’exprimer le bon sens populaire. Le roi lui-même y est résolu, et le 25 juillet 1593, après un ultime entretien avec l’archevêque de Bourges à la basilique Saint-Denis, il se déclare convaincu. S’agenouillant, il jure « devant la face du Dieu tout-puissant de vivre et mourir en la religion catholique, de la protéger et défendre encore et contre tous, au péril de son sang et de sa vie, renonçant à toutes les hérésies contraires ».
Si l’expression « Paris vaut bien une messe ! » semble apocryphe, si Henri doit convaincre certains de ses ex-coreligionnaires, si le Saint-Siège se montre au premier abord prudent, l’effet de cette abjuration est indéniable. Le sacre est célébré à Chartres le 25 février 1594. Paris ouvre ses portes le 22 mars suivant. Le tenace duc de Mayenne subit un ultime échec à Fontaine-Française, en Bourgogne, le 5 juin 1595, ce qui entraîne peu après sa soumission. L’irréductible duc de Mercœur, farouche ligueur replié enBretagne, compose à son tour en mars 1598. Le 2 mai suivant, le traité de Vervins ramène la paix entre la France et l’Espagne. Enfin, Henri IV tient les promesses de sa déclaration de Saint-Cloud, faite neuf ans aupara
vant, en promulguant l’édit de Nantes*. Le 13 avril de cette même année 1598, cet acte affirme le catholicisme religion d’État tout en conférant aux réformés des garanties élémentaires d’exercice du culte.
La politique de réunification, prônée par Henri III, est achevée. L’unificateur béarnais se montre alors constructeur. On reconnaît toujours un grand chef ou un grand monarque à la qualité de ses commis d’État. Dans ce cas, Henri IV est un grand roi, car Sully, Olivier de Serres, Adam de Craponne, Barthélemy Laffemas, entre autres, sont autant d’avisés serviteurs. Sous leur impulsion, la France panse ses plaies, laboure, cultive, plante, travaille, préparant la réussite du Grand Siècle.
sources : Dictionnaire de l’histoire de France Perrin sous la direction de Alain Decaux et André Castelot .ed Perrin 1981
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