jeudi 6 février 2020, par
Alfred, parfois écrit Ælfred (né entre 846 et 849 et mort le 26 octobre 899), fut roi du Wessex de 871 à sa mort, et roi de tous les Anglo-Saxons à partir de 878, sans jamais contrôler la totalité du territoire anglais. Quatrième fils du roi Æthelwulf et très probablement de la première femme de ce dernier, Osburga, il succède à son frère Æthelred en tant que roi du Wessex et de Mercie en 871.
Alfred est célèbre pour avoir organisé la défense du royaume contre les Danois, et obtenu en conséquence l’épithète « le Grand » : il est le seul monarque anglais à être connu comme tel. Des détails de sa vie nous sont connus grâce aux travaux d’un ecclésiastique gallois de l’époque, Asser, évêque de Sherborne. En homme instruit, Alfred soutient l’éducation et améliore le système judiciaire du royaume.
Il est considéré comme saint par l’Église catholique romaine et fêté localement le 12 décembre.
Alfred est né à Wantage, dans l’Oxfordshire (comté historique du Berkshire), entre 846 et 849. Il se serait montré un enfant particulièrement beau et prometteur, et des anecdotes de son enfance sont restées dans les annales. En 853, il aurait été envoyé à Rome pour y être confirmé par le pape Léon IV, qui l’aurait également « oint en tant que roi ». Des ouvrages postérieurs décrivent cet évènement comme un couronnement anticipé, en préparation de sa succession au trône du Wessex. Cependant, cela ne pouvait être prédit en 853, car Alfred avait alors trois frères aînés. Il est plus raisonnable de considérer cet évènement comme une investiture dans les insignes consulaires ou dans certains titres royaux, comme celui du sous-royaume du Kent.
Cette histoire est probablement apocryphe, bien qu’Alfred ait effectivement pris part en 854-855 avec son père à un pèlerinage à Rome, séjournant quelque temps à la cour de Charles le Chauve, roi des Francs. En 858, Æthelwulf meurt.
Pendant les courts règnes de ses deux frères les plus âgés, Æthelbald et Æthelberht, on ignore tout de la vie d’Alfred. Mais avec l’accession au trône de son troisième frère, Æthelred, en 866, commence la vie publique d’Alfred : il travaille à délivrer l’Angleterre des Danois. Lors de ce règne, Asser donne à Alfred son titre unique de secundarius, qui semble indiquer une position proche de celle exprimée par le terme celte tanist, successeur officiel et reconnu, en étroite liaison avec le prince régnant. Cet arrangement est probablement pris par le Witenagemot, pour prévenir le danger d’une succession houleuse en cas de mort d’Ethelred au combat. Cependant, l’arrangement consistant à couronner un successeur en tant que second roi est répandu chez les peuples germaniques, comme les Scandinaves ou les Francs, avec qui les Anglo-Saxons ont des relations suivies.
En 868 Alfred épouse Ealhswith, fille d’Æthelred Mucil, l’ealdorman des Gaini, un peuple vivant dans le Lincolnshire près de Gainsborough. Cette petite-fille d’un ancien roi de Mercie lui donne cinq ou six enfants, dont une fille, Æthelflæd, qui deviendra dame de ce pays.
La même année, Alfred, combattant aux côtés de son frère Æthelred, tente sans succès de libérer la Mercie de la pression des Danois. Pendant presque deux ans, le versement d’un tribut aux Danois permet au Wessex d’être épargné. Mais fin 870 un conflit éclate, et l’année suivante est à juste titre appelée « l’année des batailles d’Alfred ».
Neuf batailles sont menées avec divers résultats. Le lieu et la date de deux d’entre elles sont perdus. Une embuscade couronnée de succès, à Englesfield dans le Berkshire (31 décembre 870), est suivie d’une défaite cuisante à la bataille de Reading (4 janvier 871), puis, quatre jours plus tard, par la brillante victoire d’Ashdown, près de Compton Beauchamp, dans la région de Shrivenham. Le 22 janvier 871, les Anglais sont à nouveau vaincus à Basing, et le 22 mars 871 à Marton, dans le Wiltshire. Les deux batailles non identifiées ont pu se produire dans l’intervalle.
En avril de la même année, Æthelred trouve la mort, et la charge de poursuivre les combats revient alors entièrement à Alfred. Pendant que ce dernier assiste à l’enterrement et aux autres cérémonies officielles entourant la mort de son frère, les Danois remportent en son absence une victoire contre les Anglais, en un lieu non précisé. Sa présence, néanmoins, ne suffit pas à empêcher une nouvelle défaite en mai, à Wilton.
Une trêve est convenue entre les deux camps. Pendant les cinq années suivantes, les Danois partent guerroyer dans d’autres parties de l’Angleterre, et Alfred se contente de poster plusieurs garnisons aux frontières du royaume.
En 876, le nouveau chef des Danois, Guthrum l’Ancien, rompt finalement la trêve en lançant une attaque contre Wareham, dont il s’assure le contrôle. Depuis cette ville, et sous prétexte de venir parlementer, les Danois entament au début de 877 une forte poussée vers l’ouest qui se solde par la prise d’Exeter. Alfred les assiège dans cette ville et, une flotte de renfort danoise ayant été dispersée par une tempête, les Danois doivent se soumettre et se replier en Mercie.
Dès le mois de janvier 878, les guerriers danois organisent une contre-attaque contre le bourg fortifié de Chippenham, où Alfred passe justement l’hiver, « et la plupart des gens furent réduits, à l’exception du Roi Alfred, qui put s’échapper avec quelques autres par les bois et les marécages, et après Pâques il édifia un fort à Athelney, et depuis ce fort il continua à combattre l’ennemi » (Chronique anglo-saxonne). Depuis le concile de Tours (567), la période de 12 jours entre Noël et l’Épiphanie est sacrée. C’est probablement l’origine de la trêve de Noël. Alfred, très attaché aux nouvelles valeurs chrétiennes, refusa, dit-on de livrer bataille pendant les « douze ». Il dut ainsi abandonner la place forte de Chippenham.
Une légende raconte comment, alors qu’il s’enfuit à travers les marécages d’Athelney près de North Petherton dans le Somerset, une paysanne ignorant son identité lui confie la surveillance de quelques gâteaux qu’elle a mis sur le feu. Préoccupé par le sort de son royaume, Alfred laisse les gâteaux brûler et se fait réprimander au retour de la femme. Lorsqu’elle réalise à qui elle s’adresse, la paysanne se confond en excuses, mais Alfred persiste à se déclarer fautif. La représentation d’Alfred, lors de sa retraite à Athelney, en fugitif abandonné de tous, provient de cette légende des gâteaux. En réalité, il organise déjà sa future victoire. Une autre légende le dépeint d’ailleurs sous le déguisement d’un harpiste, s’introduisant dans le camp de Guthrum pour dérober ses plans de bataille.
Dès le mois de mai, ses préparatifs achevés, il effectue sa sortie du fort d’Athelney, rejoint sur la route par d’autres troupes levées dans le Somerset, le Wiltshire et le Hampshire. Les Danois, de leur côté, sortent de Chippenham, et les deux armées se confrontent lors de la bataille d’Ethandun ou Edington. Alfred y remporte une victoire décisive, et obtient la soumission des Danois. Le roi Guthrum et vingt-neuf de ses partisans acceptent même de recevoir le baptême. À l’issue d’une entrevue entre les deux camps, un compromis durable coupant l’Angleterre en deux est trouvé : le sud-ouest pour les Anglo-Saxons et le nord-est, baptisé Danelaw, sous la domination des Danois. Respectant l’accord (dit par les historiens traité de Wedmore, bien qu’aucun document écrit n’ait subsisté), les Danois évacuent dès l’année suivante le Wessex et l’ouest de la Mercie.
Bien que le nord-est de l’Angleterre, y compris Londres, reste encore sous le contrôle des Danois, l’événement marque un retournement des rapports de force. Les quelques années suivantes sont pacifiques, les Danois étant tenus occupés sur le continent européen. Un débarquement des Anglais dans le Kent, en 884 ou 885, bien qu’infructueux, pousse les Danois à la révolte. Alfred parvient à réprimer l’insurrection et s’empare de Londres en 885 ou 886. Le traité dénommé « paix d’Alfred et de Guthrum » (souvent confondu avec le traité de Wedmore) est alors signé, consacrant l’expansion territoriale des Anglais et la prise de Londres.
Une fois de plus suivent quelques années de trêve. À l’automne 892 et 893, un dernier conflit survient. Les Danois, dont les implantations en Europe deviennent de plus en plus précaires, se replient en deux grandes vagues sur l’Angleterre : les réfugiés de la première vague, plus nombreux, s’installent à Appledore, et ceux de la deuxième vague, menés par Haesten, à Milton dans le Kent. Le fait que les nouveaux envahisseurs amènent femmes et enfants montre qu’il ne s’agit pas d’un simple raid de pillage, mais d’une tentative concertée, avec les Danois déjà sur place, de conquérir l’ensemble de l’Angleterre. Alfred, en 893 ou 894, positionne ses troupes de façon à pouvoir observer les deux populations. Tandis qu’il entame des négociations avec Haesten, les Danois d’Appledore entrent en guerre et poussent leurs forces vers le nord-ouest. Mais le fils aîné d’Alfred, Édouard (futur Édouard l’Ancien), les bat lors d’une bataille à Farnham. Subissant défaites après défaites, ils vont trouver refuge sur l’île de Thorney dans l’Hertfordshire, puis dans l’Essex, puis rejoignent les forces menées par Haesten, à Shoebury.
Alfred, en route vers Thorney pour apporter des renforts à son fils, apprend que d’autres Danois mettent le siège à Exeter : à l’issue d’une marche forcée vers l’ouest, il y met fin à temps. Au même moment, les troupes menées par Haesten remontent la vallée de la Tamise, peut-être avec l’idée de porter secours à leurs compatriotes. Mais ils sont interceptés par une grande armée sous commandement des ealdormen de Mercie, Wiltshire et Somerset, qui les repousse vers le nord-ouest, avant finalement de les cerner à Buttington, non loin de l’embouchure de la Wye. Les Danois tentent d’enfoncer les lignes anglaises, au prix de lourdes pertes : les rares qui parviennent à passer retournent se barricader à Shoebury. Après avoir rassemblé des renforts, ils entament une rapide traversée de l’Angleterre pour aller occuper les ruines romaines de Chester. En plein hiver, les Anglais renoncent à un siège, et se contentent de détruire tous les moyens de subsistance dans les environs. Au début de 894, la faim pousse les Danois à se retirer une fois de plus en Essex. Dès la fin de l’année, néanmoins, ils descendent la Tamise en bateau et établissent un camp fortifié à environ trente kilomètres en amont de Londres. Une attaque frontale de la part des Anglais échoue, mais plus tard dans l’année Alfred découvre un moyen d’obstruer le fleuve afin de bloquer toute sortie aux embarcations ennemies. Réalisant qu’ils sont cernés, les Danois fuient vers le nord-ouest et passent l’hiver à Bridgnorth. L’année suivante (896 ou 897), ils renoncent à lutter. Quelques-uns se retirent en Northumbrie, d’autres dans l’est de l’Angleterre. Ceux qui n’ont aucun lien antérieur avec l’île retournent sur le continent. La longue campagne est terminée.
L’issue du conflit témoigne de la confiance qu’inspirait la personnalité d’Alfred, son talent à commander les hommes, et prouve également l’efficacité de ses réformes militaires. Ces dernières ont consisté :
à diviser en deux la milice nationale (le fyrd), afin que l’une puisse remplacer l’autre à intervalles fixes et que la continuité des opérations militaires soit garantie ;
à édifier des bourgs fortifiés et établir des garnisons en plusieurs points stratégiques ;
à imposer à tout propriétaire de cinq arpents de terres les obligations militaires d’un vassal envers son suzerain, s’assurant ainsi le soutien de combattants nombreux et bien équipés.
Après sa victoire sur l’envahisseur danois, Alfred tourne son attention vers le renforcement de la marine royale, et des navires sont construits selon les plans du roi lui-même, d’un côté pour réprimer les assauts des Danois de l’Est-Anglie et de Northumbrie sur les côtes du Wessex, de l’autre pour empêcher le débarquement de nouvelles hordes. Cela ne constitue pas, comme on le prétend souvent, le début de la marine royale anglaise, puisqu’il y a des opérations navales antérieures sous le règne d’Alfred. Un combat naval est certainement mené sous Æthelwulf (en 851), et d’autres encore avant, probablement en 833 et en 840. Il s’agit bien néanmoins de la création de la première flotte de guerre permanente d’Angleterre
La Chronique anglo-saxonne, partisane, attribue à Alfred la construction d’un nouveau type de vaisseau, plus rapide, plus durable, et aussi plus réactif que les autres ; mais ces nouveaux vaisseaux ne sont pas un grand succès, d’après les rumeurs selon lesquelles ils s’échouent pendant les combats et coulent durant les tempêtes. Cependant, la Royal Navy et l’United States Navy proclament Alfred fondateur de leurs traditions.
La force principale de combat d’Alfred est séparée en deux, « afin qu’il y eut toujours la moitié à la maison et l’autre moitié en campagne » (Chronique anglo-saxonne). Le niveau d’organisation requis pour mobiliser son importante armée en deux relais, dans lequel l’un nourrit l’autre, doit avoir été considérable. La complexité atteinte par l’administration d’Alfred en 892 est démontrée par une charte raisonnablement fiable dont la liste de témoins inclut un thesaurius, cellararius et pincerna, respectivement trésorier, gardien de nourriture et boucher. Malgré l’irritation d’Alfred en 893 quand une division, qui avait « terminé son relais », abandonne le siège d’une armée danoise alors qu’Alfred arrive pour les relever, ce système paraît avoir fonctionné relativement bien dans l’ensemble.
Une des faiblesses des défenses avant Alfred reste que, en l’absence d’une armée régulière, les forteresses sont largement laissées inoccupées, créant la possibilité pour une force viking de s’assurer rapidement une position stratégique forte. Alfred améliore significativement l’état de plusieurs forteresses du Wessex, ainsi que le démontrent des fouilles systématiques de quatre bourgs west-saxons (Wareham, Cricklade, Lydford et Wallingford) : « à chaque fois, les remparts que les archéologues ont daté de l’ère alfrédienne constituaient la première défense de l’endroit ». Les spécialistes estiment donc que de ce genre de défenses n’est pas une construction des Danois, simples occupants occasionnels. Leur démonstration s’appuie sur les copies existantes du formidable manuscrit administratif connu sous le nom de Burghal Hidage, daté moins de 20 ans après la mort d’Alfred ; il pourrait même dater du règne du roi encore vivant, puisqu’il reflète indubitablement la politique administrative du souverain. Ce témoignage atteste des positions de quatre forteresses, entre autres, qui auraient été surveillées en permanence par une garnison. En comparant les plans de ville de Wallingford et Wareham avec ceux de Winchester, on peut voir « qu’ils sont réalisés d’après un même plan4. Ces témoignages soutiennent l’idée que ces nouveaux bourgs sont considérés comme des centres d’habitation aussi bien que comme des comptoirs commerciaux et qu’ils peuvent servir de refuge en cas de menace imminente. Le code de taxation Burghal Hidage définit les obligations pour l’entretien et la défense de ces bourgs. Les populations sont ainsi attirées dans ces villes où elles sont à l’abri des Vikings, et où elles peuvent être taxées par le roi.
On attribue ainsi à Alfred une certaine réorganisation de la société, spécialement dans les régions dévastées par les raids danois. Même si Alfred n’est pas l’auteur du Burghal Hidage, il est indéniable que pour les parties de la Mercie reprises par Alfred aux Vikings, c’est alors que le système des shires (comtés), du hundreds (centième) et de la dîme est introduit. Ceci est peut-être à l’origine de la légende qui veut qu’Alfred ait inventé ce système de division administrative et de taxation.
Concernant les finances, le sujet reste obscur et la description par Asser de la manière dont Alfred tirait ses revenus n’est au mieux qu’un idéal. Cependant, le soin apporté par Alfred à la justice semble conforté autant par la légende que par les historiens et il semble donc bien mériter son surnom de « protecteur des pauvres ».
De l’action du Witenagemot, sorte de cour des pairs, au cours du règne d’Alfred, on ne connaît pas grand-chose. Les circonstances ainsi que le caractère du roi pourraient bien avoir donné plus de pouvoir à ce dernier. Les lois promulguées sous Alfred le sont probablement à la fin de son règne, lorsque la pression des Danois s’est relâchée.
Relations internationales
Asser parle des excellentes relations qu’Alfred aurait entretenues avec des puissances étrangères, mais peu d’informations sûres nous sont parvenues. Il correspond certainement avec Élie III, le patriarche de Jérusalem et envoie probablement une mission en Inde. L’envoi de donations au pape à Rome est assez fréquent. L’intérêt d’Alfred pour les pays étrangers est également démontré par les ajouts qu’il a faits à sa traduction d’Orose.
Autour de 890, Wulfstan de Hedeby entreprend un voyage depuis Hedeby dans le Jutland par la mer Baltique jusque Truso, ville commerçante de Prusse. Wulfstan relate ce voyage à Alfred le Grand.
Ses relations avec les princes celtes de la partie sud de l’île sont mieux connues. Assez tôt au cours de son règne, les princes gallois du sud se soumettent à Alfred, à cause de la pression subie de la part de la Galle du Nord et de la Mercie. Plus tard, la Galle du Nord suit cet exemple, tandis que la Mercie collabore à la campagne de 893 (ou 894). Les donations d’Alfred aux monastères d’Irlande ou du continent sont notées par Asser et paraissent indiscutables. La visite de trois pèlerins « scots » (entre autres, irlandais) en 891 est sans conteste authentique. Le récit apocryphe du voyage qu’Alfred aurait accompli étant enfant en Irlande afin d’être guéri par Sainte Modwenna démontre l’intérêt porté à cette île.
L’histoire de l’Église au temps d’Alfred est encore plus obscure. Les invasions danoises pèsent lourd sur elle, et les monastères sont des cibles privilégiées des attaques. Bien qu’Alfred ait fondé deux ou trois monastères et fait venir des moines étrangers, il n’y a pas alors de renaissance générale du monachisme.
Alfred lui-même apporte un éloquent témoignage sur la ruine de l’enseignement et de l’éducation apportée par les Danois et de la quasi-extinction de la connaissance du latin, y compris parmi le clergé, dans sa traduction en vieil anglais de la lettre pastorale du pape Grégoire Ier. En remède à ces maux, il établit une école de cour sur le modèle de celle de Charlemagne. Pour cela, il fait venir des savants d’Europe, comme l’évêque de Reims Hincmar, l’abbé Grimbald, Jean Scot Érigène et de Galles du Sud comme Asser. Il reprend lui-même le chemin de l’école, apprend le latin à quarante ans et réalise une série de traductions en langue saxonne pour l’instruction du clergé et du peuple, traductions qui nous sont pour la plupart parvenues. Cet effort est mené à la fin de son règne, probablement durant les quatre dernières années sur lesquelles les chroniques sont généralement silencieuses.
Si l’on excepte le Handboc ou Encheiridion qui est perdu et qui semble n’avoir été qu’une compilation de citations, la première œuvre traduite est Dialogues de Grégoire, un livre très populaire au Moyen Âge. Sa traduction est menée par un grand ami d’Alfred, Werferth, évêque de Worcester, le roi ne fournissant qu’une préface. La traduction suivante est celle du "Pastoral" de Grégoire le Grand, spécialement destinée au clergé de paroisse. Alfred y reste très proche de l’original. Il y ajoute toutefois une préface qui est un des documents les plus intéressants de son règne où on le voit se préoccupant avec ardeur des moyens de répandre l’instruction parmi son peuple. Les deux œuvres suivantes relèvent du domaine de l’histoire : Histoires d’Orose et l’Histoire ecclésiastique du peuple anglais de Bède le Vénérable. La préférence doit être donnée à la traduction d’Orose, même si ce point a été fort débattu. Alfred en modifie tellement le texte, par de nombreux ajouts et retraits, qu’il produit pratiquement une nouvelle œuvre. Alfred le Grand fit également traduire en y participant les Sept livres contre les païens d’Orose, dont il compléta, pour le nord de l’Europe, l’approche géographique grâce à des récits de voyage de navigateurs. Pour la traduction de Bède, par contre, il reste très près du texte, aucune addition n’est faite, même si quelques passages sont négligés. Ces dernières années, la paternité de Alfred sur la traduction de Bède a été mise en doute. Mais les sceptiques n’ont pas encore réussi à étayer complètement leurs assertions.
Sa traduction la plus intéressante est celle du Consolation de la philosophie de Boèce, le manuel de philosophie le plus populaire au Moyen Âge. Alfred prend également de grandes libertés avec l’original, et bien que G. Schepss démontre que de nombreuses additions ne sont pas l’œuvre d’Alfred lui-même mais proviennent de gloses et de commentaires qu’il utilise, de nombreux passages montrent le génie d’Alfred. C’est dans cette traduction que l’on retrouve la phrase régulièrement citée : « Ma volonté était de vivre dignement toute ma vie et de laisser à ceux qui viendraient après moi le souvenir de mes bonnes réalisations ». L’œuvre nous est parvenue par deux manuscrits seulement. Dans l’un d’eux, les poèmes qui émaillent le texte sont rendus en prose, dans l’autre (les Mètres de Boèce), en vers. Malgré des grandes controverses à ce sujet, ces vers sont probablement l’œuvre d’Alfred. L’authenticité de l’ensemble de l’œuvre n’a jamais été mise en doute.
Alfred donne à sa dernière œuvre le nom de Blostman, qui vient de Blooms ou Anthologie. La première partie est basée principalement sur les Soliloques de Saint Augustin d’Hippone, le reste provient de nombreuses sources et contient beaucoup d’éléments caractéristiques d’Alfred. Les derniers mots peuvent être une épitaphe tout à fait convenable pour le plus noble des rois anglais : « Therefore he seems to me a very foolish man, and truly wretched, who will not increase his understanding while he is in the world, and ever wish and long to reach that endless life where all shall be made clear ». (« Il m’apparaît donc comme un fou, un homme bien malheureux, celui qui ne cherche pas à comprendre le monde d’ici-bas, et qui ne désire pas atteindre cette vie éternelle où tout deviendra clair. »).
Alfred meurt le 26 octobre 899, bien que l’année exacte reste incertaine — mais pas 900 ou 901. La cause de sa mort reste inconnue.
À côté de ses œuvres propres, Alfred inspire d’autres écrits : la Chronique saxonne, presque certainement et un martyrologe saxon dont nous n’avons conservé que des fragments. Il aurait rédigé une version en prose des cinquante premiers psaumes. Cette attribution n’est pas prouvée mais est parfaitement possible. De plus, Alfred joue un rôle dans The Owl and the Nightingale (le hibou et le rossignol) qui met en avant sa sagesse et sa connaissance des proverbes. Les proverbes d’Alfred qui nous sont parvenus dans un manuscrit du XIIIe siècle contiennent des dictons qui tirent probablement leur inspiration en partie du roi.
Un poème satirique français de la seconde moitié du XIe siècle décrit un roi fictif inspiré par Alfred le Grand et le roi Arthur. Li Romanz des Franceis est la réponse d’André de Coutances à cette précédente satire française dirigée contre les Anglais (et sans doute aussi contre les Normands) ainsi qu’Arflet de Northumberland directement inspiré de Alfred le Grand. Les extraits traitent Arlfed de "roi des buveurs de cervoise".
En l’honneur d’Alfred, l’université de Liverpool a créé une chaire de littérature anglaise Roi Alfred.
sources wikipedia
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